Juliette Agnel : L’épaisseur du temps
Galerie le Lieu Hôtel Gabriel 56, LorientFrance
08/06/2018 - 25/07/2018
Série Les Nocturnes - ©Juliette Agnel
Pendant près de 10 ans, Juliette Agnel a été en route. Elle a traversé des territoires, voyagé au Mali où les routes sont rouges, en Côte d’Ivoire où elles apparaissent vertes ou bien encore au Niger où on les découvre jaunes. De l’Afrique, jusqu’à la Corée, de l’Islande à la Norvège, son appareil photo et sa caméra se sont fait le réceptacle de contrées à explorer, de rencontres à faire.
« J’ai cru pendant longtemps que j’allais faire du documentaire », explique-t-elle. C’est de cette première ambition, grâce à laquelle elle a travaillé avec les équipes de Jean Rouch et s’est confrontée à l’ethnographie, que lui est resté le goût pour les voyages et la découverte. Mais, dit-elle encore : « les paysages étaient toujours pour moi à la fois traversés et imaginés, des supports de fiction ».
C’est dans ce sens qu’il faudra comprendre sa série Laps, réalisée entre 2003 et 2005 au Niger, en Côte d’Ivoire et en Guinée, série éminemment subjective dans laquelle elle filme des routes en Super 8, ces routes qui sont aussi celles de ses racines puisque c’est là, sur ces terres lointaines, que sa grand-mère est née. Les images, fruit d’un flux arrêté, sont pleines de grain, mais la lumière de l’Afrique semble avoir laissé sa marque sur ces routes à n’en plus finir.
C’est avec la série Coréenne, puis celle des Éblouis que pour la première fois des visages émergent de l’obscurité. Chargés d’une intense picturalité, ces portraits sont réalisés grâce à un dispositif de camera obscura numérique. Une chambre noire nous ramène aux origines de la photographie et permet la création d’une image originelle. Témoignant du monde, apparition, ou disparition, les images obtenues, conservent ce halo dans lequel se forme une zone d’incertitude visuelle où le temps se dilate.
Léa Bismuth